Le marché des changes à Bukavu traverse une période de forte turbulence, marquée par une instabilité chronique des taux de change et une disparité inquiétante entre les différents circuits de conversion monétaire. Tandis que la Banque centrale du Congo affiche un taux officiel depuis Kinshasa, celui-ci reste largement ignoré par les acteurs de terrain, au profit de taux fluctuants dictés par la spéculation et le manque de régulation.
Les écarts sont particulièrement notables selon les canaux utilisés, comme le mobile money, où le dollar américain s’échange entre 2 800 et 2 850 francs congolais (FC), alors que sur le marché informel, les taux peuvent grimper jusqu’à 3 000, voire 3 500 FC. Ces différences traduisent une véritable anarchie sur le marché des changes, exacerbée par une pénurie de liquidités, une circulation croissante de faux billets et la fermeture de certaines institutions bancaires.
Cette situation affecte directement le pouvoir d’achat des ménages, en particulier les plus vulnérables. L’érosion du franc congolais se répercute sur les prix des biens de première nécessité, créant une inflation rampante et creusant davantage les inégalités. Les ménages à faibles revenus peinent à joindre les deux bouts, dans un contexte où l’accès à une devise stable devient un luxe.
L’environnement économique est d’autant plus fragilisé par la montée de l’insécurité liée aux opérations de change manuel dans la rue. Cambistes et clients s’exposent à des risques accrus d’agression ou de tuerie, dans une économie où l’absence de contrôle favorise les dérives.